La « Maturità » renaît en Italie : retour de l’examen d’État et nouveautés majeures
La Chambre des députés italienne a adopté définitivement la réforme de l’examen de fin d’études secondaires, officiellement rebaptisé « Maturità », en s’inspirant du système antérieur à 1999. Cette loi marque l’abandon de l’Ésse di Stato mis en place il y a plus de deux décennies et réintroduit une épreuve finale avec des modalités profondément remaniées pour redonner du poids au mérite et à la responsabilité individuelle.
Nouveau format de l’épreuve orale : quatre matières et sanctions en cas de blocage
Dès la session 2026, l’épreuve orale se concentrera sur quatre disciplines préalablement choisies chaque janvier par les élèves. Le ministère de l’Éducation souhaite ainsi :
- Rétablir la centralité de l’échange direct entre le candidat et la commission, en valorisant la prise de parole et l’argumentation.
- Associer l’examen à la notion d’engagement citoyen : des activités extrascolaires jugées « hautement méritoires » pourront être prises en compte.
- Sanctionner le refus systématique de participer : tout candidat « zéro dialogue » se verra ajourné.
Le ministre Giuseppe Valditara affirme que « boicoter volontairement l’interrogation orale sera inenvisageable ». Une mesure destinée à contrer les « scènes muettes » observées lors des dernières sessions, où certains étudiants exprimaient leur désaccord politique.
Réduction du nombre de commissaires et formation obligatoire
La composition des jurys d’examen évolue également : les six membres habituels sont remplacés par quatre commissaires (deux internes, issus de l’établissement, et deux externes), auxquels s’ajoute le président. L’enjeu principal réside dans la formation de ces acteurs :
- Une allocation de 3 millions d’euros en 2026 puis 11 millions par an à partir de 2027 sera dédiée à l’organisation de stages spécifiques.
- La participation à ces formations deviendra un critère « préférentiel » pour l’attribution des postes de commissaire.
- L’objectif est de garantir une évaluation fiable et homogène, loin des logiques purement comptables.
Pour la UIL Scuola, cette réduction répond avant tout à des « logiques d’économie » et risque de « menacer la qualité de la notation » si les commissaires ne sont pas suffisamment formés.
Barème inchangé mais bonus modulé
Le système de notation reste calqué sur 100 points, avec un seuil de réussite fixé à 60. Toutefois, les bonus attribués en cas d’excellence sont revus :
- Jusqu’à 3 points supplémentaires pourront être accordés par la commission si le candidat a obtenu au moins 90 points cumulés aux écrits et aux oraux (contre 97 auparavant).
- Cette modulation vise à encourager une meilleure prise en compte de la qualité globale du parcours de l’élève, sans atteindre un seuil d’excellence trop élevé.
Évolution de la voie technico-professionnelle : du 4+2 expérimental à l’ordinaire
La réforme officialise le parcours technico-professionnel en filière 4+2, jusque-là en phase expérimentale. Les points clés sont :
- Un tronc commun de quatre ans, avec programmes axés sur les compétences techniques et une pédagogie innovante.
- Des partenariats renforcés avec les entreprises pour faciliter l’apprentissage en contexte réel.
- La transformation des anciens PTCO (Percorsi per le Competenze Trasversali e l’Orientamento) en « Formation école-travail », intégrée au cursus.
Cette orientation vise à mieux préparer les jeunes à l’emploi, en réduisant l’écart entre le monde académique et le monde professionnel.
Sécurité renforcée pour les sorties scolaires
Autre volet de la loi : l’encadrement des voyages d’études. Les écoles devront désormais :
- Réserver des autocars équipés de systèmes d’assistance au freinage (EBS) et de conducteurs qualifiés.
- Choisir les prestataires selon des critères qualité/prix plutôt que le moindre coût.
- Garantir une assurance couvrant les trajets entre domicile et formations en alternance.
Cette mesure répond aux inquiétudes relatives à la sécurité des élèves lors des déplacements scolaires, souvent sous-traités à bas coût.
Financements additionnels : contractualisation et mutations régionales
Le gouvernement a débloqué plusieurs enveloppes pour accompagner la réforme :
- 240 millions d’euros pour le renouvellement des contrats des enseignants.
- 155 millions d’euros dédiés à la rénovation des établissements scolaires.
- 3 millions supplémentaires pour les Écoles Agenda SUD, s’ajoutant au milliard déjà investi.
La CGIL souligne toutefois l’insuffisance des moyens pour couvrir les besoins structurels et prévoit de réclamer des fonds plus stables pour le personnel.
Réactions politiques et syndicats face à l’urgence du calendrier
L’opposition critique l’urgence de ce décret, estimant que la « Maturità » n’était pas prioritaire. Le M5S dénonce une vision utilitariste de l’éducation, « pliée aux exigences du marché », et regrette l’absence de bilans sur la phase expérimentale. Du côté syndical, les réserves portent sur :
- La réduction des commissaires jugée dictée par l’économie budgétaire.
- Le transfert d’une partie des économies sur la formation plutôt que sur la valorisation des acteurs déjà en place.
- Les enjeux de gouvernance locale face à la centralisation de certaines décisions ministérielles.
Malgré ces critiques, la nouvelle « Maturità » s’apprête à redessiner profondément le paysage de l’enseignement secondaire italien dès la rentrée 2026.
