Un an après, la mission italienne se heurte à un nouveau silence à Rafah
Le 18 mai 2025, une délégation italienne composée de parlementaires et d’organisations humanitaires est de retour au poste-frontière de Rafah, à la lisière de l’Égypte et de la bande de Gaza. Leur objectif reste inchangé : briser le quasi-monopole de l’aide humanitaire, témoigner sur place et rompre l’omerta médiatique autour du conflit. Pourtant, à leur arrivée, ils découvrent un paysage surprenant : aucune colonne de camions, aucune file de convois, rien que des voies désertes. Depuis plus de deux mois, aucun véhicule n’entrerait ni ne sortirait de Gaza via Rafah.
Plus de deux mois sans aide : une crise humanitaire aggravée
Aux barrières fermées, les bénévoles et élus témoignent de la détresse croissante à l’intérieur de la bande de Gaza :
- Eau, vivres et médicaments accumulés en Egypte, prêts à être acheminés, mais bloqués au pied du passage.
- Populations civiles privées d’approvisionnements vitaux, risquant de déclencher une famine larvée.
- Équipements de première nécessité (matériel médical, produits d’hygiène) laissés à l’abandon, menaçant leur péremption.
Pour les ONG présentes, la rétention de l’aide au-delà de deux mois constitue un « crime contre l’humanité », surtout dans un territoire assiégé et sous blocus depuis des années.
Netanyahu annonce la reprise « minimale » des secours
En fin de journée, alors que la délégation italienne se retire du valico, un communiqué tombe de Jérusalem : le Premier ministre Benjamin Netanyahu autoriserait la reprise « immédiate » d’un flux humanitaire « minimal » vers Gaza. Les conditions posées :
- Quantité de nourriture strictement limitée pour éviter une crise alimentaire extrême perturbant les opérations militaires.
- Mécanisme de distribution hors de contrôle de Hamas pour garantir que les aides n’atteignent pas les « terroristes », selon le gouvernement israélien.
- Mise en place d’un nouveau protocole sous supervision américaine, sans précision sur l’usage futur du passage de Rafah.
Ces annonces soulèvent plus de questions que de réponses. L’ampleur de la reprise, le calendrier précis et le rôle du valico de Rafah restent pour l’heure flous.
La Mezzaluna égyptienne : prête mais impotente
Sur place, les secouristes de la Mezzaluna Rouge égyptienne confirment leur disponibilité :
- Stocks contrôlés et personnel logistique mobilisé dès que l’autorisation sera prononcée.
- Coordination établie avec les ONG italiennes et d’autres associations internationales.
- Aucun obstacle de l’État égyptien : le blocage dépend uniquement des autorités israéliennes.
Les responsables humanitaires insistent sur la nécessité d’une ouverture sans délai pour éviter le gaspillage et la détérioration des denrées stockées à Rafah.
Une protestation symbolique : « Basta complicità »
Après avoir déployé banderoles et portraits de dirigeants européens à la barrière verrouillée, la délégation italienne lance un cri d’alarme :
- Banderole « Basta complicità » pour accuser les gouvernements européens de complicité par silence.
- Portraits de chefs d’État et de gouvernement brandis pour rappeler leur responsabilité morale.
- Slogans scandés : « Le temps est écoulé » et « Agissez maintenant, ou fermez ce passage pour la déportation ».
La protestation visait aussi à attirer l’attention de l’opinion publique et à mettre la pression sur les diplomaties en France, en Italie et en Europe.
De l’opposition italienne à la société civile : une mobilisation renforcée
Portée par une coalition d’ONG (AOI, ARCI, Assopace Palestina) et soutenue par des parlementaires d’opposition (PD, M5S, AVS), la mission appelle désormais à une campagne d’information et de mobilisation en Italie :
- Pétitions citoyennes pour exiger un embargo d’armes et un cessez-le-feu immédiat.
- Rencontres avec des député·e·s de la majorité pour pousser à des résolutions au Parlement européen.
- Collectes de fonds et de vivres pour renforcer l’aide médicale, même hors circuit officiel.
Leur message est clair : « Nous continuerons à dénoncer l’inertie politique et porter la voix des civils sous les bombes. »
Un tournant diplomatique attendu
Alors que la tension monte à Gaza et que le valico de Rafah reste sous haute surveillance, plusieurs enjeux cruciaux se profilent :
- L’activation effective du mécanisme de distribution sous supervision américaine.
- Le rôle futur du passage de Rafah face à d’éventuelles rotations de convois et de secours.
- La pression de la société civile européenne pour un débat sur l’embargo d’armes et la diplomatie de paix.
Dans les prochains jours, les chancelleries seront scrutées. La mobilisation des ONG et des députés italiens pourrait inspirer des initiatives similaires à Bruxelles et Paris, où l’opinion publique réclame une sortie de crise rapide et respectueuse des droits humanitaires.