Une longévité exceptionnelle au cœur du cratère Gale
Le rover Curiosity a célébré, le 6 août 2025, ses treize années de présence sur la planète Mars. Arrivé dans le cratère Gale le 6 août 2012, il devait initialement fonctionner seulement deux ans. Pourtant, grâce à une gestion rigoureuse de son énergie et à des mises à jour logicielles, cette plate-forme mobile continue d’explorer la planète rouge et d’envoyer quotidiennement des données précieuses à la Terre.
Des origines : lancement et atterrissage
Lancé le 26 novembre 2011 depuis Cap Canaveral, Curiosity a parcouru près de 560 millions de kilomètres avant de se poser en douceur au sein du cratère Gale. L’opération d’« airbag » et de descente par grue lunaire avait marqué l’histoire des missions martiennes. Ce succès initial a ouvert la voie à des dizaines de milliers d’échantillons d’images et de mesures in situ.
Le secret de sa longévité : le générateur radioisotopique
Contrairement aux rovers Spirit et Opportunity, alimentés par panneaux solaires, Curiosity utilise un générateur thermoélectrique à radioisotope (MMRTG). Ce dispositif exploite le décroissance du plutonium pour produire un courant continu et stabilisé :
- Production d’environ 125 watts électriques constants
- Alimentation des instruments scientifiques, des systèmes de communication et des chauffages internes
- Indépendance vis-à-vis des conditions d’ensoleillement et de la poussière martienne
Ce choix technologique, partagé avec le rover Perseverance et les sondes Voyager, assure une réserve énergétique ininterrompue depuis 13 ans.
Gestion fine du budget énergétique
Chaque opération du rover – déplacement, prise d’échantillons, transmission de données, maintien thermique – sollicite l’alimentation. Pour maximiser l’autonomie, la NASA a progressivement affiné les commandes :
- Planification journalière des tâches prioritaires en fonction de la charge restante
- Réduction de la consommation des chauffages internes hors des périodes critiques
- Programmation des communications via orbiteur uniquement durant les dépassements de seuil
Cette approche garantissait initialement l’exécution d’une à une des tâches avant la mise en veille du rover. Depuis 2021, Curiosity fonctionne en mode multitâche, accomplissant simultanément plusieurs opérations – photo, analyse, envoi – ce qui réduit les temps inactifs et préserve l’énergie.
Passage au multitâche : vers plus d’efficacité
Le basculement vers un pilotage multitâche représente une rupture stratégique :
- Les instruments scientifiques peuvent désormais fonctionner pendant que le rover se déplace
- Les sessions de recharge MMRTG se synchronisent sur des périodes de faible activité
- Le traitement et la compression des données s’effectuent en parallèle, permettant d’envoyer plus de contenus vers la Terre
Grâce à ces optimisations, Curiosity est souvent « en avance » sur son programme quotidien et peut passer en mode veille plus tôt, tandis que le générateur continue d’alimenter ses batteries.
Les découvertes marquantes de Curiosity
En treize ans, Curiosity a transformé notre vision de Mars :
- Identification de traces de lacs anciens et de sédiments argileux
- Mesure en continu de la composition chimique de la roche et de l’atmosphère
- Détection de gaz organiques et de variations saisonnières de méthane
- Évaluation des radiations à la surface, essentielle pour préparer de futures missions habitées
Ces analyses confirment qu’il existe eu un environnement autrefois propice à la vie microbienne, redéfinissant les priorités de la recherche planétaire.
Le rôle de Perseverance : jumeau et relève scientifique
Arrivé en février 2021, le rover Perseverance réalise sa propre mission, mais complète Curiosity en plusieurs points :
- Deux campions de roche martienne récemment prélevés (n° 29 et 30) à Falbreen
- Panorama 360 ° capturé par Mastcam-Z, retravaillé en fausses couleurs pour mettre en valeur la géologie locale
- Test du système de collecte et d’envoi d’échantillons vers la Terre future
La coordination entre les deux rovers multiplie les points d’observation et enrichit la cartographie des gisements sédimentaires.
Une mission qui se projette vers 2040 et au-delà
Fort de son succès, Curiosity devrait continuer à opérer tant que son générateur produira suffisamment d’électricité. Les ingénieurs estiment encore plusieurs années de service, permettant d’étendre l’analyse à de nouvelles zones géologiques et de valider des protocoles qui guideront l’exploration humaine de Mars.